Bara Manon

Bara Manon

  • Born in 1985
  • Lives and works in Brussels, Belgium

Born in 1985 in France, Manon Bara is a multidisciplinary artist currently living and working in Brussels. Her creative universe spans painting, printmaking, and textile art, reflecting her generous, colourful energy and an unrelenting passion for experimentation. Manon Bara explores a wide range of subjects, using each medium as a new language to express her vision. Her work is instinctive yet intentional, blending subtlety and spontaneity.
Alongside her partner Kamal Regbi, Manon Bara co-founded the Queen Kong Gang brand, where garments become canvases—painted, wearable, and entirely unique. For Manon Bara, clothing is not just functional; it is an extension of the body, a second skin marked by patterns, textures, and emotions. From bold brushstrokes to delicate engravings, from recycled materials to raw fabrics, Manon Bara transforms textiles into works of art. The Queen Kong Gang project resists standardisation, celebrating individuality and merging fashion with contemporary art.
Manon Bara est une artiste visuelle basée à Bruxelles, diplômée en peinture de La Cambre. Elle est actuellement cheffe de l’option peinture à l’école supérieure des arts ARTS² – Arts au Carré à Mons, où elle transmet une vision de l’art et de la peinture engagée comme acte vivant et pluridisciplinaire.
À travers la peinture, la gravure, le dessin et la création textile, elle développe une pratique hybride, physique, frontale, qui explore les zones de friction entre l’intime et le politique, la blessure et la réparation, la mémoire et l’inscription.
Chez elle, les surfaces – carreaux de faïence, bois, vêtements, objets – deviennent des corps à part entière. Elle les tatoue, les grave, les marque. La peau, dans son travail, n’est jamais simple surface : elle est territoire, archive, ornementation ou cicatrice, des récits de vie atypique.
Manon Bara puise dans une iconographie liée aux corps tatoués : marins, bagnards, figures marginales, corps atypiques, souvent invisibilisés ou rejetés. Elle s’intéresse aux tatouages comme protections magiques, comme signes d’appartenance ou d’insoumission. Ces marques, qu’elles soient rituelles, punitives ou ornementales, nourrissent son imaginaire plastique. Ses figures sont porteuses d’histoires silencieuses, d’épreuves traversées, de colères muettes et d’identités rebelles.
La gravure occupe une place fondamentale dans sa démarche. Elle la conçoit comme un acte à la fois sculptural, symbolique et presque rituel : retirer de la matière, inciser la surface, révéler l’intérieur. Dans une de ses pièces emblématiques, elle grave l’image d’un cochon sur bois. Ce choix n’est jamais anodin. Le cochon, dans la tradition artistique belge, est une figure à forte charge symbolique, souvent détournée ou transgressée. Chez Félicien Rops, il devient le reflet grotesque des hypocrisies morales et sociales ; chez Wim Delvoye, un support vivant pour questionner les limites de l’art, du corps, et du commerce. Manon Bara s’inscrit dans cette lignée tout en la détournant : son cochon n’est ni une provocation ni une caricature. Il est un corps altéré, gravé comme on tatoue une peau, porteur de stigmates, de récits et de douleurs muettes. C’est une figure ambivalente, entre animal totémique, victime sacrificielle et miroir des corps sociaux.
Ce rapport entre soustraction (gravure) et addition (peinture) est central dans son travail. Dans Fight for Love, fresque réalisée à l’encre bleue sur carrelage, cette tension s’incarne dans une autre forme de tatouage : un corps fragmenté sur des carreaux blancs, entièrement peint au pinceau. Le bleu utilisé est profondément symbolique. Inspiré du bleu de Delphes, ce bleu dense, presque minéral, évoque les oracles antiques, les fresques sacrées, les silences habités. Il est porteur d’une mémoire collective, d’un mystère archaïque. Ce n’est pas un bleu décoratif mais un bleu chargé, presque spirituel. Il unit les figures, lie les blessures, fait résonner chaque motif comme une trace ancienne et actuelle à la fois.
Le personnage central de Fight for Love, tatoué de signes empruntés aux codes carcéraux, religieux et populaires, devient une figure-miroir. Le corps tatoué qui y apparaît, fragmenté sur plusieurs carreaux, peint carreau par carreau. Il porte sur lui les tensions du monde : « LOVE » contre « HATE », chaînes contre ailes, violence contre espoir. À la fois martyr et combattant, il incarne la lutte silencieuse de ceux qu’on oublie.
Sa pratique textile prolonge ce rapport au corps : elle dessine directement sur des vêtements, les tatoue pièce par pièce. Chaque vêtement devient porteur d’un fragment narratif, d’un rituel réinventé, d’une revendication douce ou d’un talisman personnel. Ces créations, entre art et mode, deviennent des peaux que l’on peut enfiler.
Son travail met en lien l’intime et le politique, le populaire et le sacré, la blessure et la réparation. Une œuvre habitée, directe, qui ne se contente pas de représenter : elle marque, elle engage, elle questionne.

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